Essentiel Avocat Sport

Droit du sport,

Le contrat de travail dans le monde du sport

Par Guillaume GHESTEM, Avocat, Victoria DREZE, Juriste, et Cassandra MARTIN, Apprentie juriste.

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Les secteurs d’activités soumis à la Convention collective nationale du sport (CCNS) peuvent avoir recours à différents contrats de travail. Cette dernière vient préciser les dispositions applicables à certains contrats. Dans cet article, nous vous présentons successivement et succinctement les différents contrats mentionnés par la CCNS.

En plus du contrat de droit commun qu’est le contrat à durée indéterminée (CDI), différents contrats plus spécifiques sont applicables pour régir les relations entre les employeurs et salariés exerçant dans le secteur du sport.

1) Le contrat à durée indéterminée intermittent (CDII) :

Le CDII[1] est un contrat à durée interminée à temps plein. Il permet l’adaptation aux variations d’activités inhérentes au secteur sportif.

En effet, il est applicable pour des postes permanents qui, par nature, comportent une alternance, régulière ou non, de périodes travaillées et de périodes non travaillées. Les juges rappellent que c’est une des conditions nécessaires pour recourir au CDII et est rappelé par les juges[2].

Le CDII est applicable :

  • Aux emplois liés à l’animation, l’enseignement, l’encadrement et l’entrainement des activités physiques et sportives, ainsi que ceux liés aux services ;
  • Aux emplois dans les établissements dont la période de fermeture est supérieure à la durée légale des congés payés.

Par période de 12 mois, le salarié devra maximum travailler 36 semaines. Il est toutefois possible d’aller jusqu’à 42 semaines de travail. Les heures réalisées au-delà de 36 semaines d’activité doivent être majorées.

Ce contrat doit contenir certaines mentions obligatoires telles que :

  • La durée minimale annuelle de travail ;
  • Les périodes de travail ;
  • La répartition des heures de travail à l’intérieur de ces périodes ;
  • Les conditions de modification de ces périodes ;
  • La date de début du cycle annuel de 12 mois.

La présence des mentions obligatoires est essentielle puisque leur absence peut conduire à une requalification du contrat de travail. Ainsi, l’absence de distinction entre les périodes travaillées et non travaillées peut conduire à la requalification du contrat en CDI de droit commun à temps plein[3].

Enfin, s’agissant du calcul de la rémunération du salarié, le temps de travail mensuel doit être égal à 1/12 du temps de travail annuel garanti figurant au contrat, majoré de 10 % pour tenir compte des congés payés.

2) Le contrat à temps partiel :

La CCNS vient préciser les dispositions applicables au travail à temps partiel[4].

A la différence du CDII, avec un contrat à temps partiel, le salarié ne connait pas de périodes non travaillées. Ce contrat a seulement une influence sur la durée du travail, puisqu’il prévoit une durée inférieure à la durée légale ou conventionnelle du travail.

En principe, il faut que le contrat prévoie une durée minimale de travail s’élevant à 24 heures hebdomadaires (ou l’équivalent mensuel ou sur une période supérieure à cette durée).

Toutefois, il est possible de déroger à ce minimum légal notamment pour les emplois qui ne relèvent pas du CDII, pour les salariés de moins de 26 ans poursuivant leurs études ou encore pour ceux en faisant la demande afin de leur permettre de faire face à des contraintes personnelles ou leur permettre de cumuler plusieurs activités dans le but d’atteindre une durée globale d’activité de 24 heures hebdomadaires voire à un temps plein.

Dans cette situation, la CCNS prévoit qu’il y a une répartition du temps de travail en fonction du nombre de jours travaillés dans la semaine.

Par exemple, pour un temps de travail contractuel réparti sur 1 jour dans la semaine, la durée minimale hebdomadaire doit s’élever à 2 heures. Lorsque le temps de travail contractuel est réparti sur 5 jours dans la semaine, la durée minimale hebdomadaire doit s’élever à 10 heures.

Le contrat à temps partiel doit contenir certaines mentions obligatoires, notamment :

  • La période de référence ;
  • La répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou, en cas de répartition mensuelle du temps de travail, entre les semaines du mois ;
  • Les cas dans lesquels les modifications éventuelles de cette répartition peuvent intervenir ainsi que la nature de ces modifications ;
  • Le délai de prévenance de cette modification, qui est de 7 jours ouvrés ; toutefois, en cas de circonstances exceptionnelles (notamment : intempéries, indisponibilité des locaux ou des outils de travail indépendante de la volonté de l’employeur), ce délai peut être compris entre 3 et 6 jours ouvrés ;
  • L’impossibilité pour l’employeur de réduire le délai de prévenance de la modification en deçà de 7 jours ouvrés en cas de circonstances exceptionnelles plus de 8 fois par an ;
  • Les limites concernant les heures complémentaires ;
  • Les modalités de communication par écrit au salarié des horaires de travail pour chaque journée travaillée, dont le délai de transmission du planning.

Pour information, les heures complémentaires sont limitées à 1/3 de l’horaire contractuel et cela sans pouvoir attendre la durée légale de 35 heures. Lorsque celles-ci n’excèdent pas 10% de l’horaire contractuel, le salarié est tenu d’effectuer ces heures proposées par l’employeur.

Il est toutefois important de préciser que les heures complémentaires sont majorées de 10%.

Ainsi, les juges considèrent que « le salarié ayant travaillé à temps plein peut demander la requalification de son contrat, y compris si la période de travail à temps complet a été accomplie en vertu d’avenants temporaires au contrat de travail. Si les heures complémentaires effectuées par un salarié à temps partiel ont eu pour effet de porter, fût-ce pour une période limitée à un mois, la durée de travail de l’intéressé au-delà de la durée légale, la requalification de son contrat en un contrat à temps plein est justifiée »[5].

3) Les contrats à durée déterminée (CDD) :

La CCNS prévoit également des dispositions qui s’appliquent à des contrats à durée déterminée. Ainsi, différents types de CDD sont explicitement prévus par la CCNS.

  • Le CDD saisonnier :

La CCNS prévoit qu’un CDD saisonnier[6] peut être conclu dans le secteur du sport.

Le recours à ce contrat, bien que prévu par la CCNS, doit être justifié in concreto. En effet, les juges considèrent que « la détermination par accord collectif des emplois pour lesquels le recours au contrat saisonnier est prévu ne prive pas le juge, en cas de litige, de vérifier concrètement l’existence de raisons objectives établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi concerné et que le contrat n’a pas pour objet de pourvoir un emploi permanent »[7].

S’agissant de la définition du caractère saisonnier d’un emploi, les juges déterminent que celui-ci « concerne des tâches normalement appelées à se répéter chaque année à des dates à peu près fixes, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs »[8].

Cette position jurisprudentielle française correspond à la définition européenne puisqu’en 1971, la Communauté économique européenne a définit le travail à caractère saisonnier comme « un travail qui dépend du rythme des saisons et se répète chaque année »[9].

La CCNS, quant à elle, prévoit plus particulièrement des dispositions concernant la reconduction du contrat saisonnier. Elle distingue selon la taille de l’entreprise en distinguant les entreprises qui ont moins de 50 salariés équivalent temps plein (ETP) de celles qui en ont 50 ou plus.

Ainsi, dans les entreprises de moins de 50 salariés ETP, un salarié embauché sous contrat de travail à caractère saisonnier bénéficie d’un droit de reconduction de son contrat lorsque 2 conditions sont réunies :

  • L’employeur dispose d’un emploi saisonnier à pourvoir et qui est compatible avec la qualification du salarié ;
  • Le salarié a effectué au moins 3 mêmes saisons dans cette entreprise sur 3 années consécutives.

Dans cette situation, l’employeur doit informer le salarié de son droit à reconduction du contrat et ce par tout moyen permettant de conférer une date certaine à cette information. De plus, si l’employeur dispose d’un emploi saisonnier à pourvoir, il propose au salarié ce nouveau contrat au plus tôt 5 mois avant le début de celui-ci.

Le salarié dispose d’un délai de 1 mois pour répondre. Toutefois, dans l’hypothèse où la proposition est formulée 2 mois avant le début du nouveau contrat, le salarié dispose d’un délai de 15 jours pour répondre. Si le salarié ne répond pas, ou répond négativement, il perd sa priorité d’accès à l’emploi proposé.

Enfin, pour la reconduction des contrats saisonniers dans les entreprises d’au moins 50 ETP, la CCNS renvoie aux accords d’entreprises qui peuvent être négociés.

  • Le CDD d’intervention :

Le CDD d’intervention[10] est un contrat de travail dont le recours est strictement encadré :

  • Réservé à l’organisation de compétitions ou manifestations sportives nationales ou internationales, d’une ampleur exceptionnelle, d’une durée limitée dans le temps et n’ayant pas vocation à se répéter au cours d’une même année civile ;
  • Il a pour objet la mise en œuvre des tâches spécifiquement liées à tous les services nécessaires à la qualité et au bon déroulement de ces manifestations ;
  • Sa durée est liée à celle de l’évènement organisé.

Un CDD d’intervention peut aussi être conclu pour les périodes de préparation et/ ou de clôture d’une manifestation sportive de dimension internationale pour les employeurs dont leur objet principal est l’organisation de cette manifestation.

  • Le CDD spécifique hors Chapitre XII de la CCNS :

Enfin, la CCNS précise les dispositions applicables à la conclusion d’un CDD spécifique[11] pour les sportifs et entraineurs professionnels qui ne relèvent pas du chapitre XII sur le sport professionnel. Sont repris les dispositions prévues dans le Code du sport ou le Code du travail s’agissant notamment des mentions obligatoires, de la durée du contrat ou encore des conditions de rupture anticipée d’un tel contrat (qui sont celles de droit commun).

Toutefois, la CCNS vient apporter des précisions sur la classification de ces salariés. En effet, la classification du salarié va influer sur sa rémunération, puisque les salaires minima conventionnels (SMC) varient en fonction du groupe dans lequel se situe le salarié. Ainsi, la CCNS prévoit que le sportif doit se situer a minima dans le groupe 2 et l’entraineur dans le groupe 4 de la grille de classification.

Pour conclure, la CCNS vient préciser dans de nombreuses dispositions les règles applicables aux contrats de travail pouvant régir les relations entre les employeurs et les salariés du secteur.

Certains de ces contrats peuvent être particulièrement adaptés au secteur sportif à l’image du contrat à durée indéterminée intermittent qui prend en considération les variations d’activités qui sont inhérentes à ce secteur. Quelque soit le contrat de travail choisi, une attention particulière doit être portée à la rédaction du contrat et particulièrement aux mentions obligatoires qui doivent être spécifiées.


[1] Article 4.5 de la CCNS

[2] Cour de cassation, Chambre sociale, 15 mai 2014, 12-27.516 et s. ; CA Paris, 6, 10, 19-10-2022, n° 19/01104

[3] CA Metz, 24-01-2022, n° 19/02505

[4] Article 5.1.5 de la CCNS

[5] CA Amiens, 16-12-2020, n° 19/01726

[6] Article 4.7.1. de la CCNS

[7] Cour de cassation, Chambre sociale, 6 Novembre 2013 – n° 12-19.877

[8] Cass. soc., 12-10-1999, n° 97-40.915

[9] Conseil CEE, règlement n° 1408/71 du 14 juin 1971

[10] Article 4.7.2 de la CCNS

[11] Article 4.7.3 de la CCNS


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