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Droit du sport,

Les clubs peuvent-ils baisser la rémunération des joueurs ?

Par Guillaume GHESTEM, Avocat, et Victoria DREZE, Juriste

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Depuis le début de la crise sanitaire liée à la COVID-19, nombreux présidents de clubs de football professionnels plaident pour une baisse des rémunérations de leurs joueurs.

Ces demandes ont finalement étaient entendues. Le mardi 12 janvier 2020, une réunion a eu lieu entre les présidents de clubs de L1 et de L2 et l’UNFP, le syndicat des joueurs de football professionnels de France, pour négocier une éventuelle baisse des salaires. Cette discussion est revendiquée par plusieurs présidents et l’UNFP comme une solution pour sauver les clubs impactés par la crise sanitaire et par la défaillance de Médiapro.

Juridiquement, se pose la question des possibilités qui existent vraiment pour les présidents des clubs souhaitant effectuer une diminution de leur masse salariale. Peuvent-ils décider d’une baisse généralisée ? Doivent-ils négocier individuellement avec tous leurs joueurs ? Etc.

Même si le monde du sport est spécifique et particulier, il relève des dispositions légales de droit commun, notamment du Code du travail en matière sociale et du Code du sport.

Il faut préciser que la règle en droit français est l’interdiction de la baisse de la rémunération des salariés sans leur accord individuel. La Cour de cassation a notamment énoncé que la rémunération contractuelle d’un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié, même de manière infime, sans son accord (1).

Cette interdiction vaut pour le salaire fixe mais également pour les primes figurant dans le contrat de travail du salarié.

L’employeur n’est donc pas bloqué. Il peut négocier avec le salarié une éventuelle baisse de sa rémunération. Cette négociation peut être individuelle (2) ou collective (3).

D’une part, l’employeur peut négocier directement avec son salarié. Dans ce cas, si le salarié, en l’espèce le joueur, accepte, l’employeur peut réduire son salaire. Il est ici impératif que le joueur n’agisse pas sous la pression et qu’il soit conscient et ouvert à cette baisse de rémunération. L’accord du salarié doit être express et non équivoque et la diminution de salaire doit faire l’objet d’un avenant au contrat de travail, tout en respectant les minimas légaux et conventionnels.

D’autre part, l’employeur peut négocier avec les délégués syndicaux pour conclure un accord de performance collective. Cet accord permet de modifier la rémunération des salariés de l’entreprise, du club. S’il est valablement conclu, il se substitue de plein droit aux clauses contraires du contrat de travail, y compris en matière de rémunération. Si le salarié refuse la modification de sa rémunération, donc le contenu de l’accord, l’employeur peut, dans les deux mois, engager une procédure de licenciement qui reposera sur une cause réelle et sérieuse.

Néanmoins, cette solution ne semble pas opportune en matière de sport professionnel. En effet, le sport professionnel possède des contraintes sociales qui rendent cet accord bien moins efficace. Le sportif professionnel est forcément engager par son club par le biais du CDD spécifique. Or, la sanction pour un salarié refusant l’accord de performance collectif ne peut être qu’un licenciement, réservé aux CDI.

Les textes sur l’accord de performance collective sont muets à l’égard des salariés en CDD. Ils sont libres d’accepter l’accord, à défaut, ils ne pourront pas être licenciés car les dispositions régissant la résiliation des CDD sont d’ordre public et les cas de rupture anticipée sont strictement limitatifs (4).

La même solution est invoquée en cas de négociation d’une baisse des rémunérations pour motif économique. Un salarié qui refuse peut être licencié pour motif économique, mais pas un salarié en CDD car ce n’est pas un cas de force majeure (5).

Si un salarié en CDD est licencié par son employeur, il peut agir devant le Conseil des Prud’hommes. La sanction pour l’employeur est l’obligation de payer au salarié sa rémunération du moment de la rupture du contrat jusqu’au terme prévu contractuellement, plus les congés payés et l’indemnité de fin de contrat (6).

La marge de manœuvre est donc réduite pour les présidents de clubs de L1 et de L2. Leur seul espoir est que les joueurs acceptent individuellement une baisse de leur rémunération.

D’ailleurs, l’UNFP ne souhaite pas, et ne peut pas, annoncer une baisse des salaires si un accord est trouvé, mais une recommandation pour les joueurs d’accepter de diminuer leur rémunération. C’est à chaque dirigeant de négocier avec chacun de ses joueurs de gré à gré.

(1) Cass. soc., 18 octobre 2006, n°05-41.643. (2) Article L1222-6 du Code du travail. (3) Article L2254-2 du Code du travail. (4) Cass. soc., 24 octobre 2000, n°98-40.447. (5) Cass. soc., 20 février 1996, n°93-42.663. (6) Article 1243-4 du Code du travail.

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