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Droit du sport,

Sportifs pros : Obligations médicales particulières pour leurs employeurs

Par Guillaume GHESTEM, Avocat, Victoria DREZE et Cassandra MARTIN, juristes.

Photo de Jerry Yu sur Unsplash

Le sport est une activité à risque pour le corps des pratiquants. La recherche de performance notamment physique est centrale dans la pratique sportive.

Cet enjeu est d’autant plus marqué pour le sportif professionnel. Son corps devient son outil de travail.

En conséquence, les employeurs sont soumis à des obligations de sécurité et de santé au travail[1]. Ces dernières constituent un véritable enjeu dans le cadre du sport professionnel.

Le sportif professionnel est la personne qui exerce une activité sportive rémunérée dans un lien de subordination avec une association ou une société sportive. Le sportif doit conclure un contrat de travail avec une telle structure et ce contrat est un CDD spécifique.

  1. Le sportif professionnel : un salarié comme un autre…

L’employeur d’un sportif professionnel est soumis aux obligations de sécurité et de santé découlant du Code du travail.

En effet, si le Code du sport[2] prévoit que les fédérations sportives délégataires assurent l’organisation de la surveillance médicale des pratiquants, cette surveillance médicale ne dispense pas les employeurs des sportifs professionnels de satisfaire aux obligations relatives aux services de prévention et de santé au travail qui leur incombent en application du Code du travail[3].

2. … mais une surveillance accrue portée sur sa santé

Quelques aménagements aux dispositions du Code du travail peuvent toutefois être listés.

D’une part, le Code du sport prévoit que dans les deux mois suivant son embauche le sportif professionnel doit se soumettre à un certain nombre d’examens[4].

Il doit effectuer à un électrocardiogramme de repos et à un examen médical réalisé par un Médecin du sport[5]. Cet examen comprend :

  • Un examen clinique avec interrogatoire et un examen physique selon les recommandations de la Société française de médecine de l’exercice et du sport ;
  • Un bilan diététique et des conseils nutritionnels ;
  • Un bilan psychologique visant à dépister des difficultés psychopathologiques pouvant être liées à la pratique sportive intensive ;
  • La recherche indirecte d’un état de surentraînement via un questionnaire élaboré selon les recommandations de la Société française de médecine de l’exercice et du sport.

Ces examens devront être renouvelés annuellement. Cela démontre d’un véritable renforcement de la surveillance et de la protection de la santé des sportifs professionnels salariés. En effet, de tels examens étaient initialement prévus pour les sportifs de haut niveau. Depuis 2018, les sportifs professionnels salariés sont également concernés.  

D’autre part, les fédérations sportives délégataires ou les ligues professionnelles peuvent exiger la réalisation d’examens médicaux complémentaires et selon une fréquence qu’elles déterminent[6].

Les fédérations sportives et ligues professionnelles ont pu se saisir de la possibilité qui leur est laissée de renforcer la surveillance médicale des sportifs professionnels salariés.

Dans le cadre de la participation des clubs en « Synerglace Ligue Magnus » (Championnat de France de hockey sur glace), la Fédération Française de Hockey sur Glace (FFHG) prévoit que les joueurs titulaires d’un contrat de travail se soumettent aux examens prévus dans le Code du sport[7].

A l’inverse, d’autres fédérations et ligues professionnelles renforcent la surveillance des sportifs professionnels salariés.

Tel est le cas de la Ligue Nationale de Rugby (LNR).  Est ainsi établi un Livret médical réunissant l’ensemble des textes et des documents relatifs au domaine médical applicables dans le secteur professionnel. Ce dernier précise également les obligations des clubs.

Le référentiel médical commun établi par la Commission médicale de la LNR définit les examens complémentaires impératifs ainsi que leur fréquence de renouvellement.

En fonction de la situation des joueurs professionnels, la liste des examens médicaux impératifs évolue. Celle-ci sera d’autant plus dense dans le cadre de la signature d’un premier contrat professionnel, espoir ou pluriactifs.

A titre d’exemple, la Commission médicale préconise qu’une échographie cardiaque soit réalisée tous les deux ans et qu’une épreuve d’effort maximal soit renouvelée tous les quatre ans.

Lorsqu’un joueur a été commotionné au cours de la saison précédente, un bilan neurologique doit être effectué au début de la saison.

En outre, un bilan dentaire certifié par un spécialiste doit être réalisé une fois par an.

La protection de la santé des sportifs professionnels est un enjeu majeur qui incombe notamment à leurs employeurs.

En cas de manquement pour le club, des sanctions peuvent être prises à son encontre. En application de leurs réglementations, les fédérations ou ligues professionnelles peuvent sanctionner les clubs. Ainsi, les règlements de la Ligue de Football Professionnel (LFP) prévoient qu’en cas de non-enregistrement régulier des blessures des joueurs, le club pourra se voir sanctionner d’une amende par la Commission des Compétitions, après rappel, pouvant aller jusqu’à 20 000 euros[8].

L’employeur peut également s’exposer à des décisions défavorables devant les conseils prud’hommaux. En effet, de tels manquements peuvent constituer une faute grave de l’employeur justifiant la rupture anticipée du CDD spécifique.


[1] Article L4121-1 Code du travail

[2] Article L231-6 Code du sport

[3] Quatrième partie, Livre VI, Titre II du Code du travail

[4] Article A231-5 Code du sport

[5] Article A231-3 Code du sport

[6] Article A231-5 Code du sport

[7] Article 33, Chapitre III, Règlement SLM 4 des Règlements généraux de la Synerglace Ligue Magnus de la FFHG

[8] Article 584 Règlement administratif LFP 2023/2024

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